samedi 12 juin 2021 sur la scène du Grand théâtre
à 14h
Samedi dernier, après quatre-vingt-deux jours, les étudiants, élèves et apprentis qui occupaient La Colline depuis le 9 mars ont choisi de partir. Après avoir remercié les gardiens, après avoir rangé leurs affaires et décroché leurs écriteaux, ils ont quitté le théâtre. Le communiqué qu’ils ont diffusé le lendemain témoigne de l’intensité de cette expérience pour eux.
Pour l’équipe de La Colline qui a tenté tout au long de cette occupation de garder la juste place, il s’agit à présent de comprendre ce que cet événement signifie. Si un théâtre est le lieu où peuvent s’exprimer toutes les exigences, certaines des revendications portées par les occupants nous ont forcés à nous questionner : Quel sens notre théâtre peut-il avoir au sein de la société ? Quelle place la jeunesse a-t-elle au sein des institutions ? Comment rendre compte de ce que cette présence a bouleversé dans la perception que nous avions de ce que nous appelons « la jeunesse » ? Leur occupation aura révélé des angles morts nous forçant à nous demander comment nous allions dès à présent incarner cette prise de conscience pour que cela ne reste pas lettre morte.
En ce sens, si leur départ ne sonne pas la fin d’une période mais un début, alors la réouverture de La Colline ne peut se faire sans un geste par la jeunesse et envers la jeunesse. Les jeunesses devrions-nous dire.
Ouvrir par un rituel pour écouter ce que ces jeunesses traversent. Rituel de la parole. Sans hiérarchie entre ceux qui parlent et ceux qui écoutent. Une conversation, un grand cercle, 120 personnes assises en rond sur le grand plateau. Ouvrir La Colline consistera donc à essayer de dire. Premier cercle, premier geste, premier pas, aurore d’un commencement ce samedi 12 juin, toute la journée, avant que d’autres projets ne prennent le relais pour repenser en profondeur la présence de ces jeunesses à La Colline au-delà de ce qu’elle déployait déjà.
Nous devons essayer de nous transformer car les choses ont été retournées, à la fois par la crise sanitaire et par la crise sociale qu’elle a révélée. Alors que le départ des occupants nous offre la possibilité de reprendre nos activités, celle d’accueillir des artistes, de proposer des spectacles, de retrouver le public, ce dont nous sommes infiniment heureux, il est de notre responsabilité de ne pas effacer ce qu’une centaine de jeunes personnes a voulu faire entendre de leurs situations deux mois durant.
Ce seront donc des gens de leur âge qui rouvriront le théâtre de la Colline.
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Wajdi Mouawad, vendredi 4 juin 2021
avec Maud Lafaye, Achille di Zazzo, Cassandre, Wissam, Sophie Leroux, Mohamed Sadallah, Selma, Servane, Neven Sébastien Khéroufi, Lou-Adriana Bouziouane et Rachid-Amir Moudir
Sentant qu’il y a nécessité et urgence à dire, a fortiori face aux événements traversés récemment, La Colline souhaite déployer l’idée du Colloque jeunesse mené depuis quatre années.
Le théâtre propose d’ouvrir ses portes par un temps et un espace d’expression où témoigner, questionner, partager autour des enjeux qui semblent essentiels dans cette période particulière... En s’affranchissant des habitudes et conviant toutes les personnes présentes à s’installer sur la scène, il s’agira de favoriser une atmosphère intime et bienveillante, propice à l’écoute et aux échanges.
Quatre jeunes personnes ont accepté d’œuvrer à l’élaboration de cette journée. À partir de ce qui les anime, ils préparent des pistes de sujets et de dialogues possibles, sur lesquels d’autres jeunes intervenants viendront s’exprimer pour nourrir l’échange et faciliter la conversation. Conversation dont nul ne présume ce qu’il adviendra, mais dont chacun espère qu’elle parvienne à faire entendre les mots d’aujourd’hui.
Ils ont imaginé utiliser cet espace d’expression à partir de ce qui les anime, notamment :
Comment briser l’engrenage de l’accélération perpétuelle de notre temps ? Comment parler des genres, comment construire son identité ? Comment diffuser la pensée décoloniale et antiraciste de façon à faire bouger les lignes ? Comment défendre nos lieux de vie ? Comment l’art peut-il être vecteur d’émancipation ?